Tourisme durable

Le lac Titicaca de Valentin

30 Mars 2024 - Conservation / Hébergement / Initiatives / Nature

Au Pérou, Valentin Quispe a développé une initiative touristique au bord du lac Titicaca pour préserver sa culture traditionnelle et que toute la communauté de son village puisse profiter des retombées du tourisme. Grâce à lui, les voyageurs vivent une expérience proche des habitants et plus respectueuse de cet environnent fragile.

 

Long de 190 km, le Titicaca représente l'équivalent d'environ 15 fois le lac Léman ! ©SSquillace

 

La lumière du soleil inonde tout. Le lac d’un bleu profond est grand comme une mer. Situé à 3850 mètres d’altitude, à cheval entre la Bolivie et le Pérou, le lac Titicaca est considéré comme le plus haut lac navigable du monde. La mythologie inca y situe l’origine de sa civilisation. De quoi attirer des voyageurs ! Mais si l’on souhaite découvrir la culture et les traditions des habitants qui peuplent les rives du lac, partager leur quotidien et contempler la beauté des lieux, il faut se rendre sur la péninsule de Capa Chica, à La Casa de Valentin, dans le village de Llachon.

 

Pionnier de la promotion et du développement de l’écotourisme
 

Si une poignée de voyageurs viennent jusqu’ici aujourd’hui, c’est grâce à Valentin Quispe. Dès 1996, il propose aux familles de sa communauté de rejoindre l'association qu’il vient de créer et commence à développer différents services dans le village endormi de Llachon : hébergement, transport sur le lac, repas, promenades en bateau.

Je suis parti de zéro, je n'avais aucune formation. Avec la pratique et l'arrivée des premiers touristes, j'ai appris. C'était une auto-éducation - Valentin Quispe

Valentin dévoile avec humilité son histoire ©SSquillace

 

Aujourd’hui, le projet implique environ 180 des 300 familles de Llachon. L’objectif est multiple : que les touristes reçoivent un bon service doublé d’une expérience authentique et que les familles touchent une juste rémunération, voient leurs conditions de vie s’améliorer et leur culture préservée. “Il faut éviter les jalousies, bien répartir les réservations entre les familles, donner du travail à tout le monde”.

Pendant leur séjour, les voyageurs prennent le temps de s’imprégner des lieux, de rencontrer les femmes qui coupent des roseaux pour donner en pâture au bétail, les hommes qui reviennent de la pêche ou s’escriment à sarcler leurs champs pour mieux cultiver maïs, quinoa ou pomme de terre. D’autres partent pour une balade en kayak ou rejoignent une des îles flottantes où vivent les communautés Uros - les plus anciens habitants du lac Titicaca.

 

Les habitants des rives du lac vivent principalement de la pêche, de l'élevage et de l'agriculture ©SSquillace

 

Après être allés au mythique Machu Picchu, très nombreux sont les visiteurs souhaitant découvrir les îles Uros, entièrement construites à partir de roseaux, le totora. Celles proches de la grande ville de Puno, d’où partent la majorité des bateaux, sont devenues malheureusement une sorte de parc d’attractions, à fuir par leur manque d’authenticité. Au départ de Llachon, Valentin propose de rejoindre une petite île où vivent encore deux familles, essentiellement de la pêche, et un peu du tourisme. Mais rien à voir avec le tumulte touristique de Puno.

 

La petite île flottante demande beaucoup d'entretien avec l'ajout régulier de totora fraîche ©SSquillace


 

Reconnaissance et transmission
 

L’initiative de Valentin a servi d'exemple et encouragé d’autres communautés indigènes à reproduire le même modèle au Pérou. L’entrepreneur au chapeau de feutre a été invité aux quatre coins du pays pour partager son expérience. En 2009, le ministère du Tourisme récompense son initiative par un voyage aux États-Unis pour promouvoir le tourisme au Pérou !
 

Valentin avec Pepe, le lama de la famille ©SSquillace

 

Après toutes ces années, Valentin insiste sur le rôle crucial de l’éducation dans la réussite de son projet. Pendant des années, il intervient à l’école du village pour sensibiliser les enfants, les convaincre que le tourisme peut être une chance de maintenir leur culture et leurs traditions dans un endroit oublié du reste du monde, “pour trouver un équilibre” dit-il.

Son fils, Jesus, fait partie de cette nouvelle génération consciente de la valeur de son identité, qui a envie de rester à Llachon travailler dans une activité qui fait sens, plutôt que de migrer vers Puno ou Lima.

Je crois à ma terre et à tous les êtres vivants, à la Pachamama, qui donne la vie et est la source de tout. La nature s’offre à ceux qui la protègent et la vénèrent. - Valentin Quispe