Tourisme durable

Un tourisme responsable est-il possible au Sénégal ?

13 Octobre 2024 - Culture / Nature / Préservation

Alors que ce pays d’Afrique de l’Ouest vit une révolution politique, les visiteurs curieux se demandent si l’on peut y voyager en version responsable. Découverte !

 

En Casamance © Vince Gx / Unsplash


 

Les campements intégrés, aux origines du tourisme solidaire
 

Si on en trouve aujourd’hui sous d’autres latitudes, c’est en Casamance, dans les années 1970, que sont nés les "campements intégrés", ces modestes hébergements plantés au cœur de villages, pionniers des voyages solidaires. Alors que le premier Club Med sénégalais ouvre ses portes à Cap Skirring, un autre type de tourisme voit le jour à quelques kilomètres de là. Ces campements sont construits pour éviter l’exode rural et permettre à la population locale de bénéficier des richesses des visiteurs, tout en favorisant les échanges interculturels…

Cinquante années plus tard, les structures ont mal vieilli, notamment à cause de la crise en Casamance des années 1980 et 1990 qui a forcé la désertion des touristes jusqu’en 2000, cette région du sud du Sénégal étant alors l'objet d'une revendication indépendantiste. Aujourd’hui, une grande partie de ces campements a disparu et ceux qui restent font face à d’importants enjeux : concurrence de nouveaux hébergements ou manque de personnel formé…

 

Dans le village de Marloj © Aurélie Croiziers 


 

Une offre existante
 

Cela signifie-t-il qu’il ne reste que de grandes structures internationales pour le curieux voulant découvrir le Sénégal ? L’offre de tourisme responsable existe : des initiatives sont apparues depuis les expérimentations en Casamance. Abou Ba, sexagénaire souriant, travaille dans le tourisme depuis 40 ans. Ce Sénégalais originaire de Dakar a créé sa propre agence de voyages en 2001.

Je l’ai nommée Contact Voyages Sénégal car je souhaitais que les visiteurs rencontrent les Sénégalais pendant leur séjour. Le tourisme responsable n’est pas facile à définir, mais je crois que c’est ce que nous faisons depuis les origines. - Abou Ba

Favoriser les petites structures d’hébergements tenues par des locaux ; emmener les touristes dans des endroits reculés, hors des sentiers battus et des rivages rabattus par les grandes entreprises du tourisme ; soutenir les guides locaux et les acteurs investis dans le développement économique des villages, c’est bien du tourisme responsable qu’Abou Ba propose. "J’ai été un des premiers à organiser des visites dans les villages du Sine Saloum, on m’a regardé bizarrement à l’époque, mais maintenant c’est presque un classique de la région…"

 

Dans le village de Marloj © Mélody Riobé

 

Aujourd’hui encore, nombre de touristes viennent passer une journée entre pirogue et balade en charrette dans les méandres du delta, comme dans le village sérère de Marloj.

Un peu plus loin dans ce même delta se situent la bourgade de Faoye et son campement solidaire. L’association espagnole Campamentos Solidarios loue le superbe terrain en bord de fleuve, en soutenant des projets de développement local, dans le cadre d’un bail signé pour 18 ans. Le campement emploie cinq villageois de Faoye, renouvelés tous les deux ans, pour que différentes familles profitent des revenus engendrés par le tourisme. Ainsi la communauté locale adhère au projet.

 

Dans le village de Faoye © Aurélie Croiziers

 

Un avenir à écrire
 

Depuis avril 2024, un nouveau gouvernement est à la tête du Sénégal, à la fois porteur d’espoir… et de questions : comment une équipe jeune pourra faire face à tous les enjeux de l’industrie touristique ?

Oudjah Simpa Fetter a fondé le cabinet Africa Hospitality Consultants pour développer la sensibilisation et la formation au tourisme durable en Afrique. Pour elle, "l’un des principaux défis pour le tourisme responsable au Sénégal est la préservation de l'environnement et des écosystèmes fragiles, tels que les mangroves, les réserves naturelles et les parcs nationaux."  Le zoo de Dakar est tristement représentatif de la situation : dans le beau parc de Hann, véritable poumon vert dans la très construite Dakar, les infrastructures sont archaïques et les animaux vivent un calvaire. Nul ne peut rester insensible devant les lions parqués dans de minuscules cages avec du ciment sous leurs griffes !

Si les défis sont de taille, Oudjah ne manque pas de propositions pour les relever : "impliquer les communautés, favoriser leur participation, promouvoir le partage équitable des retombées économiques du tourisme tout en respectant les traditions, coutumes et droits des populations locales". Oudjah cite le Club Med de Cap Skirring en Casamance en exemple : “ils soutiennent l'agriculture locale et écologique, développent l'éducation et la santé dans la région, et invitent régulièrement les artisans locaux à exposer et vendre leurs œuvres dans le Resort…"

 

Sur une plage sénégalaise © Simonetta Pugnaghi / unsplash

 

On ne peut que souhaiter que ce type de recommandations soit mis en application pour permettre demain un meilleur tourisme au Sénégal !

 

Pour en savoir plus :
L’agence Contact Voyages Sénégal
Africa Hospitality Consultants
Le campement de Faoye