Ils avaient failli disparaître mais les bisons d'Europe ont trouvé refuge dans la forêt de Bialowieza. Tout à l'est de la Pologne, un troupeau de ces plus imposants mammifères vit en liberté. Pour les observer, il faut s'armer d'un peu de patience.
« C'est grâce à la chasse que ce massif a été sauvegardé », rappelle M. Okolow, l'ancien directeur du parc national de Bialowieza. « Depuis le XVème siècle, les rois polonais, puis les tsars de 1888 à 1917 en ont fait une réserve privée pour y traquer le gros gibier. Pour être bien sûrs de ne pas avoir de concurrents, ils y ont éliminé tous les grands prédateurs : ours, loups, lynx. » Dès 1921, l'État polonais a converti 5 000 ha encore pratiquement intacts en parc national. « Pas de moteur, pas de pollution. Ici, on respire l'air le plus pur d'Europe ».
C'est dans cette nature qu'on peut croiser aujourd'hui des bisons. Oui, des bisons, avec des cornes, une bosse et du poil partout, Bison bonasus, ceux-là mêmes qui ont bien failli devenir une espèce disparue. Aujourd'hui environ 800 individus folâtrent dans le massif, dont 460 précisément côté polonais. « Tous sont les descendants de 7 individus qui étaient dans des zoos » raconte Jerzy Dackiewicz, responsable du centre de reproduction des bisons.
Pour observer le plus gros mammifère d'Europe en liberté dans la forêt, il faut Jerzy. Il connaît un coin où il semble possible d'approcher un clan d'une trentaine d'individus.
Soudain, il tend l'index en direction d'un rideau de bouleaux. Craquements de branches, échos de cavalcade, nos chers bisons ne semblent guère disposés à recevoir du monde. Fort heureusement, c'est l'hiver, le moment de l'année où les hardes affamées se rassemblent près des postes de nourrissage approvisionnés en fourrage plusieurs fois par semaine par les gardes du Parc.
Le lendemain sur les coups de 8h, dans une clairière, un tracteur, avec sa remorque chargée d'un fourrage fort appétissant, fait sa tournée de distribution en lisière de forêt. Du foin ? Et la fameuse herbe à bison alors ?
« C'est exact, les bisons mangent plusieurs espèces d'herbes, des laîches, de l'écorce de charme ou de frêne, des champignons, mais la zubrowka, cette herbe sucrée qui pousse seulement dans les clairières, n'a jamais été leur favorite. Tiens voilà Poligraf qui sort ! » fait remarquer Jerzy. « C'est un mâle né dans notre centre de reproduction qu'on a relâché en 2009, il est habitué à l'homme et c'est toujours l'un des premiers à s'approcher ! » Les bottes de foin et les pains de betteraves semés dans le sillage du tracteur font sortir progressivement toute la bande incapable de résister en ces temps de disette à d'aussi alléchantes gourmandises.
Derrière leur air de bovin, il faut cependant se méfier. Chaque année, des touristes imprudents en font l'expérience. Uwaga zubry ! Attention aux bisons ! Prudence notamment devant les femelles avec leur petit, ou lors de la saison des amours. Enfin, les propriétaires de chien feront bien de le laisser à la maison : les bisons détestent les chiens, probablement en raison de leur ressemblance avec l'ennemi ancestral, le loup.
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