
Après une petite journée en voiture depuis Tbilissi, la capitale de la Géorgie, on touche à la Touchétie. Région du Caucase où les tours valent les détours.
Dans la prairie satinée, quelques chevaux broutent. Sur notre passage, ils relèvent la tête, étonnés. Une pente douce conduit jusqu’à Zémo Omalo (Omalo-le-Haut), un village constitué d’une cinquantaine de vieilles maisons de pierres sèches, très élégantes avec leurs balcons de bois ciselés. Plusieurs sont en travaux. Elles en avaient besoin et feront de belles maisons d’hôtes, signe que la Touchétie commence à se faire connaître. Un panneau planté dans un champ indique la direction d’une auberge — fast food. Il ne faudrait quand même pas aller trop vite en besogne sous peine de rompre le charme.
Au-dessus de Zémo Omalo (1880 m), se dressent les tours de Késélo, vestiges d’une époque lointaine où il fallait se protéger contre les pillards en provenance de Tchétchénie et du Daghestan situés à une poignée de kilomètres. La paix revenue, elles furent ensuite converties en habitation, avec au rez-de-chaussée la pièce où l’on préparait la popote dans un chaudron suspendu au-dessus du foyer central. Que les amateurs de tours se réjouissent, on en trouve ailleurs qu’à Omalo, le plus grand village de Touchétie et un des seuls à rester peuplé durant l’hiver, enseveli sous une couche de neige d’au moins un mètre.
Dans les villages environnants séparés par des crêtes, à-pics, précipices et autres reliefs vertigineux, à Shenako, à Dartlo, à Diklo, à Parsma, aussi, les Touches ont démontré qu’ils avaient plus d’une tour dans leur sac. C’était à qui construisait le plus beau « Manhattan des alpages ». Assez injustement, leurs talents de bâtisseurs n’ont pas impressionné tant que ça les Géorgiens, qui ont préféré colporter que les Touches riaient aux blagues seulement le lendemain, qu’ils étaient en quelque sorte les cousins du crétin des Alpes.
Maîtres ès tours en pierres sèches, les Touches depuis l’Antiquité sont aussi des bergers infatigables. Secondés par leurs chiens, des bergers du Caucase auxquels on coupe les oreilles afin d’éviter qu’un loup ne les arrache lors d’un combat, ils conduisent leurs troupeaux jusqu’aux pâturages les plus reculés, ceux qui donneront au lait et donc au fromage un supplément de saveur.
Dans les parages du village de Bochorna - perché à 2 345 mètres, il ravirait à Ouchgouli, le record de « village habité toute l’année le plus haut d’Europe » grâce à la présence d’une seule personne-, deux baraques de rondins et de tôles servent de refuge à deux bergers et une odeur teigneuse, capable de faire pleurer un ours tchétchène. Vassili et son acolyte Kako ne chôment pas : quatre traites par jour sans compter la fabrication du fromage.
À la mi-octobre, quand le temps commence à se gâter, ils descendent leurs moutons au village de Kvemo Alvani en Kakhétie, rangent leur houlette dans un placard, et là, attendent que le printemps les autorise de nouveau à regagner leurs très chers alpages.
Plus d’information : Georgian National Tourism Administration (GNTA)
Or noir, or blanc de l'Azerbaïdjan