La deuxième ville de Colombie a su se réinventer après des années noires sous la férule des cartels de la drogue. Intégration sociale, urbanisme et désormais écologie sont les maîtres-mots de cette mue.
Vingt ans après la mort de Pablo Escobar en 1993, la ville que le célèbre baron de la drogue avait terrorisée n’était plus la même. Dans le monde entier, l’innovation sociale et urbaine de Medellín, deuxième ville du pays, était saluée comme l’exemple à suivre, à tel point que le Wall Street Journal avait, en 2013, décerné à Medellín le titre de capitale de l’innovation.
Il n’est pas difficile de toucher du doigt les transformations qui ont tout changé. Il suffit de louer les services d’une agence pour découvrir les principaux spots qui font de cette ville en cuvette - bien qu’à 1495 mètres d’altitude - cernée par les montagnes de la cordillère des Andes, dans la province d’Antioquia, une démonstration de résilience.
Sur les hauteurs du quartier chic du Poblado, le regard embrasse une myriade d’habitations tapissant les collines. Autrefois, ces quartiers pauvres, appelés les “comunas“ étaient coupés du reste de la ville, là où sont les emplois et les richesses. Ils étaient craints, la criminalité y prospérait. Aujourd’hui, nombre de ces comunas sont reliées au centre-ville par des téléphériques, un réseau appelé Metrocable construit par la société française Poma.
Une ligne transporte 3000 passagers par heure et raccorde le métro ou les bus. Ces connexions rapides, qui survolent les pentes habitées à 3000 mètres de hauteur, ont désenclavé les quartiers défavorisés, reliant le centre en 7 minutes, mais ce n’est pas tout. Des immeubles ont été construits au sommet pour proposer des logements décents aux habitants. Plus tard, des escaliers mécaniques ont été construits pour faciliter l’accès à certaines comunas comme celles d’Independencia ou Comuna13.
Au pied des stations, des plateformes d’activités gratuites ont été installées. On les appelle les “bibliothèques“ mais ces bâtiments proposent quantité d’animations : informatique, ateliers créatifs, garderie d’enfants, médiathèque, cellule d’accueil des jeunes… Sur la plateforme du Parque Biblioteca San Javier, les citadins bavardent sur un banc, les enfants jouent. Avant, ils ne disposaient d’aucun espace collectif dans les ruelles escarpées de leur colline.
Autrefois encore, un autre quartier, Moravia, servait de décharge publique au beau milieu d’une dizaine de milliers d’habitants. La décharge formait elle-même une nouvelle colline : de déchets. Au début des années 2000, la municipalité ferme le site, assainit les sols, recouvre le tout de terre pour créer un jardin et des serres qui alimentent aujourd’hui les pépinières de la ville et fournissent de l'emploi. Quelque 40 000 personnes vivent désormais dans ce quartier transformé.
C’est aussi sur la lutte contre le réchauffement climatique que les pouvoirs publics concentrent désormais leurs efforts pour rendre la ville plus respirable. Medellín envisage sa neutralité carbone d’ici à 2050.
C’est ambitieux : la ville est très polluée. Mais en quelques années sont apparus de véritables “corridors verts“ longeant la rivière, des centaines de milliers d’arbres ont été plantés, une pépinière géante a vu le jour et la ville achète des terrains boisés pour les protéger. Beaucoup reste à faire, mais l’énergie est une qualité très ancrée chez les paisas, les habitants de la région.