Tourisme durable

L'UMIH multiplie les engagements en faveur du Développement Durable

25 Octobre 2016 - Actualité / Initiatives / Portrait / Préservation

Syndicat regroupant la grande majorité des acteurs du secteur Hôtellerie-Restauration, l’UMIH (Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie) a fait depuis quelques années du Développement Durable et de la RSE un de ses chevaux de bataille et multiplie les actions dans ce sens. Rencontre avec Karim Khan, le président de sa Commission Développement Durable.

Karim Khan

 

TV5MONDE : Comment vous présenter en quelques mots ?
 
Karim Khan : Hôtelier-restaurateur dans la région de Rennes, je suis le président de l’UMIH 35 (Ille-et-Vilaine) en charge par ailleurs de la commission nationale dédiée au développement durable. Depuis plusieurs années maintenant, avec d’autres membres, nous travaillons beaucoup à développer tout ce qui a trait au développement durable et à la RSE, nous interrogeant sur la manière de faire évoluer nos métiers, de les revaloriser en les rendant à la fois plus vertueux et plus attirants.
 
TV5 : Pouvez-vous nous présenter l’UMIH, nous parler de son importance et de ses différentes missions ?
 
KK : L’UMIH est un syndicat professionnel regroupant environ 85% des entreprises du secteur : hôtels, restaurants, cafés, boîtes de nuit… Pour la plupart ce sont des entreprises indépendantes, mais nous comptons également parmi nos membres des groupes aussi importants qu’Accor. La mission de l’UMIH est de fédérer les acteurs pour mieux les représenter et défendre, auprès des pouvoirs publics, entre autres. Compétences juridiques, sociales, etc. Nous faisons également beaucoup de lobbying car nos professions et leurs problématiques sont souvent mal connues. Mais le fait de nous être regroupés permet de plus d’avancer collectivement plus rapidement sur des dossiers comme le développement durable.
 
TV5 : Justement, on a pas mal parlé cet été de l’opération corse « rispettu ». Pouvez-vous nous en dire deux mots ? Est-ce une première ?
 
KK : Rispettu (« respect » en langue corse) est une initiative lancée au moment de la COP 21 par l’UMIH Corse pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de l’hôtellerie locale et ses consommations d’énergie et proposant, entre autres, un modèle d’étiquettes environnementales qui permet de rendre publics ces différents éléments. Des opérations du même type ont eu lieu ailleurs, notamment dans le Morbihan. Cela fait suite à une série d’études menées pour évaluer toutes les consommations : eau, électricité, gaz, matières premières en général, aliments, etc. dans le but de savoir comment adapter nos méthodes de travail pour diminuer notre impact. Ce qui est donc entrepris dans un certain nombre d’établissements pilotes (comme ceux de Corse) qui ont le mérite de se proposer pour essuyer les plâtres et faire avancer l’ensemble des acteurs puisque les résultats obtenus permettront de mettre au point une pédagogie à l’usage des autres hôteliers. Mais aussi des clients. Car, par exemple, pour aborder de manière concrète un sujet qui concerne également ces derniers, s’il est vraiment sympathique, le matin, de trouver un buffet sur la table du petit-déjeuner, il faut savoir que cette formule entraîne un gaspillage alimentaire terrible…
 
 

Les hôteliers de l'opération Rispettu

 

TV5 : Quand l’UMIH s’est-elle dotée d’une Commission DD et quels types d’actions avez-vous déjà menées ou seront menées en priorité de ce côté ?
 
KK : Nous travaillons depuis des années sur ces sujets et avons créé la commission plus récemment (il y a deux ou trois ans) pour rapprocher les diverses actions menées et réduire les coûts. Diverses actions ou réflexions de grande envergure sont menées, soit entre nous, soit avec des partenaires comme Veolia avec qui nous travaillons sur les « gisements de déchets ». Notre profession consomme des volumes d’emballages considérables. Que faire par exemple de tous ces polystyrènes utilisés pour le transport des produits frais (la pêche notamment) ? Les collecter et revaloriser, bien sûr, oui, mais à quel prix ? Et comment faire pour ne pas créer trop de contraintes pour les professionnels, sans quoi, ils ne suivent plus ?! On compte déjà tant d’établissements qui se trouvent sur la corde raide. Il nous faut donc au contraire tout prévoir et étalonner les coûts de chaque changement pour montrer qu’ils entraînent, non seulement du mieux pour la planète, mais aussi… des économies !
 
TV5 : Vous avez également mis quelque chose en place contre le gaspillage alimentaire…
 
KK : En 2015, nous avons sorti un premier fascicule sur le sujet. Sujet vaste et complexe au possible en raison des contraintes légales nombreuses et du véritable combat mené avec des administrations qui ne sont pas toutes d’accord entre elles. Comment s’organiser tout seul (si on est à la campagne, on peut faire un compost, mais sinon ?) comment organiser sinon une filière ? Existe-t-il une plateforme de revalorisation des déchets à moins de 200 km ? (sinon, cela perd tout sens et produit l’effet contraire), etc. Heureusement, les jeunes professionnels sont de plus en plus sensibles à ces questions et de mieux en mieux formés.
TV5 : Vous parliez de la pêche. On connaît l’état des réserves halieutiques. Y-a-t-il une prise de conscience de ce côté ?
 
KK : Absolument. Nous travaillons d’ailleurs avec l’ONG Mister Goodfish sur ces questions : saisonnalité, quelles espèces, quand et combien, en privilégiant les circuits courts et en mettant les gens en relation avec les biocop. Côté gaspillage, chez les traiteurs, un vrai travail s’instaure avec les banques alimentaires, mais vous savez, les restaurateurs sont juste un reflet de l’ensemble de la société : on en est collectivement rendus au stade de la prise de conscience et du passage à l’acte, mais si celui-ci réclame un effort, tout se complique. Heureusement, on commence vraiment, depuis un an et demi environ à être sur une tendance forte. Les clients sont de plus en plus sensibles et les jeunes professionnels également.
 
TV5 : Labellisation (Clef verte), affichage environnemental, maîtres restaurateurs, les chantiers engagés sont multiples…
 
KK : « Maîtres restaurateurs » utilisant donc en priorité voire exclusivité des produits frais plutôt qu’issus de l’agro-alimentaire, oui. Nous poussons fort de ce côté et cela prend, même les centrales d’achat mettent désormais en avant leurs produits frais et issus d’une agriculture durable. Quant aux éco-labellisations, nous les encourageons bien sûr, mais sans jamais culpabiliser ; elles ont un coût et l’important est d’abord de faire passer les bonnes pratiques, les principes de fonctionnement qui font avancer les choses.
 
TV5 : D’où l’importance des formations. Depuis 10 ans, l’UMIH s’est dotée d’un important service de formation professionnelle. Le développement durable (DD) est-il présent dans les programmes proposés ?
 
KK : Bien sûr, et pour l’ensemble du personnel, pas que pour les décideurs, même si ceux-ci demeurent la pièce maîtresse. Il faut aussi créer un personnel vigilant et impliqué et les formations sont essentielles de ce point de vue. Nous intervenons dans ce sens à la demande des UMIH locales, mais le Développement Durable est présent dans les formations au moins une fois l’an.
 
TV5 : Que pourrait-on ajouter d’important qui enrichisse notre propos ?
 
KK : Nous recherchons en ce moment un établissement pilote pour travailler sur l’ergonomie des métiers les plus pénibles. Les femmes de chambre, notamment, sont sans cesse debout. Comment les soulager et rendre leur tâche moins difficile sachant que plus le personnel travaille dans de bonnes conditions, meilleur est son travail ? Je travaille également avec un ergonome et de grands fournisseurs sur un projet de nouvelles cuisines, plus adaptées, toujours pour montrer que la qualité de ce côté entraîne des économies et donc, vaut qu’on y investisse. Les projets passionnants ne manquent pas, alors que nous sommes toujours en situation de crise, ne l’oublions pas. Enfin, il est essentiel de rappeler que beaucoup dépend du client ; il est important que celui-ci se dirige et privilégie les pratiques vertueuses, seul moyen pour que l’ensemble des professionnels le devienne…
 
 
Château d'Aprigné, établissement éco-certifié d'Ille-et-Vilaine