L'archipel des Marquises se situe à 1 450 km au nord-est de Tahiti. Il est constitué d'une douzaine d'îles, dont six seulement sont habitées. D’origine volcanique, cet archipel se distingue par un relief accidenté. Plateaux et pics culminant à plus de 1 000 mètres d'altitude sculptent le paysage. Le littoral, escarpé, est un enchaînement de falaises abruptes, de baies spacieuses et de vallées profondes. Au-delà de ces paysages spectaculaires, les Marquises sont aussi le berceau d'une culture millénaire, où la médecine traditionnelle tient une place importante.


Un savoir ancestral menacé

Pendant des siècles, les Marquisiens ont vécu en harmonie avec leur environnement, utilisant les plantes pour soigner les petits maux du quotidien comme les maladies plus graves. Leur archipel abrite en effet une flore endémique remarquable. Les anciennes pratiques de soins visaient à chasser la maladie, considérée comme une possession. Elles reposaient principalement sur l'herboristerie, les massages, les soins psychologiques et la "gestion des humeurs" (raau he'a), qui impliquait des ajustements alimentaires, le jeûne et la purge. Les femmes, traditionnellement chargées des soins aux enfants, étaient les principales dépositaires de ce savoir.

Mais ces connaissances se sont érodées avec le temps. Aujourd'hui, les guérisseuses traditionnelles se font rares, le risque de voir disparaître un patrimoine inestimable est plus important que jamais.
 

Les femmes gardiennes de savoirs

Sur l'île de Fatu Hiva, l'une des plus reculées de l'archipel, Sarah Vaki veille à la préservation de la mémoire de l’île. Elle s'est engagée dans un long travail de collecte dès son adolescence : elle a précieusement consigné les remèdes traditionnels dans d'anciens cahiers d'écolier. Sa parole a été recueillie par l’association En Terre Indigène, dans le cadre du projet De la Mère à la Terre, la première plateforme d’échange et de savoirs écologiques détenus par les femmes en Outre-mer.
 

Longtemps coupés du reste du monde, les Marquisiens n'avaient pas d'autre choix que de se soigner avec leurs plantes terrestres et marines. Feuilles, écorces et algues devenaient potions, bains et cataplasmes pour former la pharmacopée traditionnelle polynésienne. Beaucoup de remèdes viennent de nos grands-mères. Il y a eu cette transmission à la fille, à la petite-fille. - Sarah Vaki

Sarah Vaki est allée à la rencontre des rares femmes de savoirs qui perpétuent cet héritage. À Fatu Hiva, il ne reste aujourd’hui que quatre guérisseuses. Parmi elles, Mamie Julie est reconnue pour ses remèdes efficaces. Elle cultive elle-même ses plantes, les cueille et les prépare avec des gestes précis, transmis par ses ancêtres. "Tous les médicaments de Mamie Julie valent de l'or", assure Sarah Vaki.
 

La nécessité de la transmission

Malgré tout, la transmission de ces savoirs ancestraux se heurte à de nombreux défis. La modernisation et l'exode rural ont fragilisé les liens intergénérationnels, rendant difficile la transmission orale des connaissances. Pour contrer cette tendance, certaines habitantes de Fatu Hiva ont décidé de transmettre leurs connaissances aux plus jeunes. Elles organisent des ateliers et des formations pour sensibiliser à l'importance de ce patrimoine. Ces espaces d'échange permettent de valoriser le savoir-faire des guérisseuses traditionnelles et de susciter un regain d'intérêt pour la pharmacopée ancestrale. Car au-delà de l'aspect thérapeutique, la médecine traditionnelle marquisienne est profondément liée à l'identité culturelle des îliens de l’archipel.

Du 20 au 28 septembre 2025, Sarah Vaki sera présente à Paris pour l’événement Les Rencontres du Matrimoine Ultramarin organisé dans le cadre du projet De la Mère à la Terre. Cet événement exceptionnel offrira l'opportunité de découvrir les plantes des Marquises et d’échanger avec elle et six autres femmes de savoirs venues de différents territoires d’Outre-mer.
 

Découvrez un extrait du documentaire "Aux îles Marquises, le soin par les plantes" :

Pour en savoir plus :
- La plateforme d’échanges de savoir De la Mère à la Terre en Outre-mer, portée par l’association En Terre Indigène.