La réputation du Kosovo n'est plus à faire. Les journaux s'en sont chargés. Mafia, guerre ethnique, trafics de tout genre et tout calibre... Il faut pourtant faire l'effort de jeter derrière le talus sa besace de préjugés et d'idées reçues pour partir dénicher les pépites longtemps ensevelies d'un pays surprenant.
Le monastère orthodoxe de Peć, à la sortie des gorges de la Rugova, celui de Deçani, blotti un peu plus au sud dans la vallée de la Bistrica et bien d'autres augustes sites religieux au Kosovo continuent d'occuper une place à part dans le cœur des Serbes. Cette chaîne de communautés est supposée avoir été le centre spirituel de la Serbie du XIème au XVème siècle. Sur les vertes pelouses de Visoki Deçani, on croise des moines.
Le père Peter, genre de Robert de Niro des Balkans affublé d'une barbe de monarque, a rejoint cette petite communauté de trente moines, qui à ses tout débuts en 1335 en comptait plus d'une centaine, avant de dégringoler à deux ou trois membres pendant la période ottomane puis communiste. Avec une contenance sévère et digne, il raconte les péripéties de Visoki Deçani, tour à tour musée puis espace de jeux avec piscine et terrains de foot, avant de retrouver sa vocation première et d'être classé patrimoine mondial de l'humanité par l'UNESCO.
Tout au sud du pays, dans le parc national des monts Sar, grand espace transfrontalier entre le Kosovo, l'Albanie et la Macédoine, la nature et le sauvage écrasent de leur majesté ces méprisables asticotages ethniques.
Ici, les ours bruns restent discrets quant à leur confession, les lynx ne se réclament que des Balkans et les loups font claquer leurs mâchoires aussi bien aux fesses des chamois chrétiens que des marmottes musulmanes.
Le village de Restelica abrite bien un nid de maisons en ruines, mais la guerre ou les vendettas n'y sont pour rien. Une avalanche les a détruites l'an dernier.
Sous la coupole d'un bleu pur et blessant, un pâle soleil attiédit des mamelons poudrés de frimas qui ne sont pas sans dégager un entêtant parfum de steppe d'Asie centrale. En lieu et place d'une horde rugissante de cavaliers mongols, le randonneur ne surprend que des hardes de chamois sagement occupés à tondre la pelouse. Le sévère exode rural qui a frappé ces dernières années les villages alentour, a aussi vidé les prairies de leurs gigantesques essaims de moutons.
Quelques chevaux broutent au loin. Des scarabées aux élytres luisants comme du métal fondu arpentent la piste de terre sur leurs longues pattes en route pour un grand nulle part. Les collines saisies par un froid aux lames de cristal semblent rouler à l'infini. Encore quelques mois de marche et nous devrions être en vue des faubourgs d'Oulan Bator...
> De 1459 à 1913 : occupation ottomane du territoire
> De 1945 à 2008 : province yougoslave
> 1989 : Milošević met fin à l'autonomie de la province
> 1989-1998 : harcèlement des populations albanophones par les troupes serbes
> 1998 : plus d'un million de Kosovars trouvent refuge en Albanie, Monténégro et Macédoine
> Mars à juin 1999 : bombardements de la Serbie par l'OTAN
> 2008 : le Kosovo déclare son indépendance. Il est reconnu par 99 pays
> 2013 : dégel des relations avec l'ancien ennemi. L'entrée dans l'UE est soumise à une normalisation bilatérale des relations entre le Kosovo et la Serbie
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