Tourisme durable

L'art Tembé, une peinture ancestrale du plateau des Guyanes

24 Juillet 2021 - Art / Culture / Patrimoine

En Amérique du Sud, au nord du Brésil, se situe le plateau des Guyanes et trois destinations à l'écart du tourisme de masse : le Guyana, le Surinam et la Guyane française. Pourtant ces territoires situés sur l'équateur ont des atouts à faire pâlir les autres pays environnants : une forêt primaire sauvegardée, une faune invraisemblable et une culture pluriethnique... et comme langage commun, un art pictural qui mérite le voyage : l’art Tembé.

 

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Estampille Tembé réalisée par Franky Amété ©OTOGctguyane

 

 

L’origine du Tembé remonte au XVIIème siècle, au temps de la colonisation de la Guyane hollandaise, le Surinam actuel. La population étant le plus souvent analphabète, certains ont imaginé une langue visuelle faite de motifs graphiques aux couleurs vives issues de pigments naturels. Les conditions de vie étant pénibles dans les plantations, les esclaves fuyaient leur servitude et s’installaient dans la forêt, près du fleuve Maroni, le plus grand fleuve de Guyane. L'art Tembé devint l’art du fleuve, celui des Noirs marrons, l'art de "ceux qui s'évadent".

 

 

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Vue aérienne de Maripasoula, village au bord du fleuve Maroni ©OTOGctguyane

 

 

Ces dernières années, cet art qui était en voie de disparition est à nouveau sous les projecteurs des salles de musées et même enseigné dans les écoles, grâce aux initiatives d'artistes comme Franky Amété. Ce Surinamien quinquagénaire a été élevé dans la culture des Noirs marrons, celle du fleuve et de la forêt, comme ses ancêtres les Bantous, déportés du Cameroun. Franky a vu ses enfants s'éloigner des traditions pour se connecter au monde et cela l'a motivé pour apprendre cette peinture et la magnifier à travers ses œuvres originales mais toujours respectueuses des anciens.

 

À l'origine, l'art Tembé manie le noir, le blanc et le rouge, mais il s'est ouvert à une palette plus grande avec par exemple le jaune, le vert et le bleu qui symbolisent chacun un élément ou un état. Il est possible d’admirer des œuvres anciennes et récentes au Musée des Cultures guyanaises à Cayenne en Guyane. Franky Amété, lui, expose régulièrement au Musée de la Transportation à Saint-Laurent du Maroni, ville frontalière avec le Surinam où il habite. Ses œuvres de grande taille ont une optique résolument contemporaine avec même l'ajout de sable comme les mandalas indiens.

 

 

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Pagaie géante réalisée par Franky Amété ©OTOGctguyane

 

 

Ainsi aujourd'hui, quand nous visitons la Guyane, le poumon vert de l'Amazonie, l'art Tembé s'affiche sur les têtes de pirogues, les façades de maisons, les pagaies et même les peignes. Les géométries et les couleurs qui le composent font référence à des notions universelles comme la famille, la nature, la mort ou la confiance. Les dessins se font tous à la règle et ainsi les triangles, losanges et autres carrés ont tous une signification pour les initiés. Le bois précieux, utilisé autrefois pour réaliser de la marqueterie, fait maintenant place à des matières plus respectueuses de l'environnement, voire du métal pour certaines œuvres.

 

 

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Franky Amété au travail ©FrankyAmété

 

 

L’art Tembé peut être un fil rouge pour découvrir le plateau des Guyanes, petit paradis pour les amoureux de Dame nature, avec la quasi-totalité de son territoire encore vierge et recouvert d'une épaisse forêt. Désormais les élèves de Guyane et du Surinam sont initiés à cette peinture et à cette langue picturale, ce qui leur permet de se réapproprier une partie de la culture locale.

 

 

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Le fleuve Maroni qui serpente dans la forêt amazonienne ©ABrusinictguyane