Lamya Essemlali pourrait “risquer sa vie pour une baleine”. La présidente de Sea Shepherd France se bat pour la protection des océans depuis près de 20 ans et lutte actuellement pour la libération de son ami et mentor Paul Watson. L’occasion de rappeler son engagement et le rôle que peut jouer le tourisme dans la préservation des écosystèmes marins.
Fondatrice en 2006 de l'antenne française de l'ONG Sea Shepherd, Lamya Essemlali commence à avoir un sacré parcours derrière elle. Native de Gennevilliers, dans les Hauts-de-Seine, rien ne la prédestinait à vouer sa vie à la défense des océans, si ce n’est la foi en un combat juste, plus grand qu’elle, plus grand que nous tous. Après son master en sciences de l’environnement, c’est une rencontre qui change sa vie, celle avec le capitaine Paul Watson.
Âgé aujourd'hui de 73 ans, Paul Watson a dédié sa vie entière à la défense de l'océan et des baleines en particulier. Avec son regard profond et sa barbe blanche, il a l’allure d’un capitaine échappé d’un bouquin de Jules Verne, le pull à capuche noir en plus ! A l’origine de l'ONG Sea Shepherd en 1977, Paul Watson compte à son actif plus de deux cent cinquante expéditions dans toutes les mers du monde pour protéger et sauver des centaines de milliers d’animaux marins.
Le mode d’action de Sea Shepherd ? La confrontation directe, c’est-à-dire une méthode dite “non-violente agressive” pour faire couler des baleiniers sans faire de victimes, ou confisquer des milliers de kilomètres de filets illégaux. Et bien sûr des campagnes de sensibilisation. À chaque mission, l’équipage filme et diffuse des images de ces grands navires-usines, dans le but d’alerter le grand public aux conséquences de la pêche illégale.
Avec son sourire généreux, Lamya Essemlali nous inspire à son tour par sa détermination et sa loyauté. Car depuis fin juillet, son combat prend une autre dimension : travailler sans relâche pour sortir Paul Watson de prison et empêcher son extradition vers le Japon où il encourt une peine de 15 ans d'emprisonnement. “Paul inspire les gens, montre que les choses impossibles sont possibles. Le Japon ne veut pas de ce symbole” dit-elle avec une voix teintée de colère et d’émotion.
Paul Watson a été arrêté par les autorités danoises au Groenland le 21 juillet sur la base d'un mandat d'arrêt international lancé par le Japon en 2012. Tokyo lui reproche des incidents supposés à bord d’un de ses baleiniers en Antarctique en 2010. À deux reprises cet été, il comparaît devant la justice danoise qui continue de le maintenir en détention. "C’est une mascarade juridique" réagit Paul Watson en sortant du tribunal le 4 septembre après que le juge ait décidé de prolonger son emprisonnement de 28 jours supplémentaires jusqu'au 2 octobre. Rappelons que le Danemark n’est pas un terrain neutre dans toute cette histoire. Le pays européen soutient l'exploitation et la chasse des cétacés, avec le fameux Grind dans les îles Féroé qui se déroule chaque année, une tradition au prix de centaines de globicéphales et dauphins éventrés et massacrés.
Cette histoire de vengeance a l’avantage de mettre en lumière la chasse baleinière illégale. Le Japon agit impunément en violation du moratoire international sur le commerce de viande de baleines entré en vigueur en 1986. Ce qui lui a valu d’être condamné en 2014 par la plus haute juridiction mondiale, le Tribunal International de La Haye, pour braconnage dans le sanctuaire baleinier en Antarctique. Le Japon continue de tuer des baleines dans ses eaux territoriales et dans le Pacifique Nord, avec une flotte baleinière plus redoutable et meurtrière que jamais.
Qui veut d’un monde dans lequel un pays qui est condamné pour chasse illégale serait en droit d’obtenir que leur soit livré comme prisonnier un véritable héros, qui n’a pas commis d’autre crime que celui d’avoir sauvé des baleines ? - Lamya Essemlali
Si nous n'arrivons pas à sauver une espèce aussi charismatique que les baleines, nous ne sauverons rien d'autre de l'océan. Et si nous ne sauvons pas l'océan, nous ne nous sauverons pas nous-mêmes - Lamya Essemlali.
Comme tout être vivant, les baleines occupent une place essentielle dans le réseau alimentaire et participent à l'équilibre de l'écosystème marin. Leur présence est signe de bonne santé des océans. Plutôt que de les chasser, il existe tant de solutions pour les sauver : de la recherche scientifique pour mieux les connaître, des sanctuaires marins et de l’écotourisme respectueux de l’environnement pour les protéger.
Dans un contexte où la demande touristique près des zones côtières continue de progresser, les acteurs du tourisme doivent s’engager en faveur de la biodiversité et de la protection de la vie sous-marine. En Indonésie, le Misool Eco Resort collabore depuis plus de 10 ans avec les communautés locales et a investi pour créer une aire marine protégée et interdite à la pêche de 828 km2 dans l’archipel des Raja Ampat, une zone extraordinairement riche en biodiversité. Depuis la création de cette aire protégée, le nombre et la taille des poissons ont augmenté de façon spectaculaire, ce qui profite également aux récifs coralliens des îles avoisinantes. Ainsi pratiqué, le tourisme maritime durable pourrait devenir l’un des meilleurs outils pour améliorer la protection des océans dans le monde tout en jouant un rôle crucial dans l’économie locale.
Pour aller plus loin :
https://seashepherd.fr/