La Mauritanie revient cette année dans le catalogue des voyagistes, au premier rang desquels La Balaguère, dont le fondateur, Vincent Fonvieille, avait tant fait pour lancer la destination voici 20 ans. Il nous dit ici la joie qu’il a de permettre à nouveau aux voyageurs de renouer avec ces Mauritaniens rapidement devenus LA raison majeure du (bref) succès rencontré par ce petit coin de planète pas tout à fait comme les autres. Une destination où, de plus, le tourisme responsable connaît des balbutiements.
Vincent Fonvieille : Je suis le fondateur et dirigeant de La Balaguère, voyagiste au départ, spécialiste des Pyrénées. Mon attachement à la Mauritanie est d’autant plus grand que ce pays fut mon premier « extra » (hors de mes frontières) et me fit donc devenir un « vrai » voyagiste. Par ailleurs, cette destination fut immédiatement un immense coup de cœur, ce qui fait que je me suis énormément investi dès 1996.
Ensuite, entre 1997 et 2007, décennie d’or, la Mauritanie devint LA destination saharienne majeure : paysages sublimes, dunes à l’infini, canyons, villes de pierres et de sable, oasis de verdure nichées entre sables blonds et grès noirs… Ajoutez-y un avion direct Paris-Atar qui vous dépose au milieu du désert, des dromadaires qui vous attendent à la sortie et vous comprendrez l’engouement suscité auprès des marcheurs en quête d’aventures fortes et de rencontres authentiques. Car la Mauritanie, comme je l’écrivais récemment dans un édito, c’est avant tout cela : un accueil, une hospitalité, un esprit d’ouverture et de tolérance à nul autre pareil. C’est la raison pour laquelle on y vient la première fois pour ses paysages, mais que l’on y revient pour les Mauritaniens…
VF : En 2007, l’agression d’Aleg – qui n’avait rien à voir avec le terrorisme – a entraîné l’annulation du Paris-Dakar et braqué les projecteurs sur la région. Cela a été le début de la descente aux enfers. Quelques voyageurs sont encore venus les années suivantes et nous avons même organisé une opération ponctuelle en 2014, remplissant un avion entier pour montrer que le pays était sûr. Mais les débordements d’AQMI en Algérie et l’assassinat du français Hervé Gourdel en Algérie en 2014 ont fini de détruire le rêve que vivaient les habitants de l’Adrar. Il faut bien réaliser qu’avant que les TO marcheurs n’arrivent, il n’y avait rien sur place et que, dès le départ, les habitants, conscients de l’opportunité qui s’offraient à eux, se sont montrés pour nous des interlocuteurs attentifs, responsables, solidaires.
Dix années durant, de 1997 à 2007, nous avons donc formé des guides, tissé des liens et réalisé, ensemble, un travail formidable qui, en quelques années, a porté ses fruits et fait connaître la destination comme un must en matière de randonnées dans le désert. Une expérience exemplaire à plusieurs titres. Ensuite, quand plus personne n’est venu, on a essayé de soutenir nos partenaires pendant un temps par des aides financières, tout en continuant de nous activer sans relâche pour tenter de réhabiliter la destination aux yeux du Quai d’Orsay. Maurice Freund en particulier, avait rendu ce rêve possible en établissant contre vents et marées avec Point Afrique cette liaison aérienne Paris-Atar. Il est finalement parvenu à faire évoluer la mise à l’index du pays qui n’est plus classé rouge.
Nous sommes donc en pleins préparatifs pour notre grand retour en Mauritanie le 23 décembre. Et nos confrères reprennent également le chemin de la Mauritanie. Tant mieux !
VF : Le risque 0 n’existe pas, on le sait, mais nous avons tout de même beaucoup de garanties. Pour faire revenir le tourisme, le gouvernement mauritanien a fait de la sécurité une question prioritaire. On trouve donc partout une présence militaire discrète sachant qu’un large couloir de protection a été installé, à plus de 500 km des zones touristiques, zone interdite où les patrouilles ont ordre de tirer à vue sur les intrus. Et puis le désert n’est pas très peuplé, mais il l’est, par des gens dont la venue de quelques milliers de touristes durant la période faste a bouleversé la vie, la rendant un peu moins difficile. Intrinsèquement motivés, tous les habitants exercent en conséquence une surveillance accrue de leur territoire. Et pour répondre à la question de référence traditionnelle en matière de sécurité : « Est-ce que vous vous y rendriez avec votre famille, vos enfants ? », je les y emmène cet hiver.
VF : Avant même la création de l’ATR, nous avons créé Déserts Propres, structure essentiellement environnementale au sein de laquelle on a commencé de se poser toutes ces questions qui devaient par la suite conduire à la création de l’ATR (Agir pour un Tourisme Responsable) et de son label. De la protection de l’environnement initial, nous sommes passés aux conditions de travail des locaux, aux garanties et moyens à apporter, etc. Un long questionnement et un travail de fond qui ont finalement conduit à la création d’ATR en 2004.
La Balaguère va bien au-delà encore des préconisations de l’ATR via l’association de solidarité qui participe au développement local. La base étant de créer de l’emploi sur place, on peut dire qu’on a trouvé des solutions valables jusqu’en 2008. Ensuite, on a fait ce qu’on a pu, avec nos moyens : financièrement ou en aidant nos guides à trouver autre chose. Tout est si fragile. Et la situation est désormais la même au Mali, parti, lui aussi, sur un si bel élan !
VF : D’abord MERCI à Maurice Freund, fondateur de Point Afrique, qui s’est tellement démené pour la Mauritanie et pour mettre en place ce vol ! Ensuite, il est important de dire qu’il a existé et existe toujours une vraie solidarité entre les voyagistes présents sur place. Concerné, réfléchi, le gouvernement mauritanien a également accepté de prendre une part des risques sur l’avion.
Les prix ont été tirés au maximum pour pouvoir proposer des semaines tout compris autour de 1000 €, voire un peu moins, ce qui en fait des voyages (extraordinaires !) tout à fait abordables. Enfin, il est essentiel de préciser que les échanges se font en français ; ce qui change TOUT, permettant de vraies discussions profondes avec les guides, puis les gens, une réelle rencontre des cultures.
Sincèrement, je crois que, comme pour quelques autres endroits dans le monde, une poignée, la Mauritanie fait vraiment partie de ces voyages dont on revient marqué… changé !
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