Kaliningrad, voilà un nom qui fait à la fois rêver tout en renvoyant à une période mouvementée d’après-guerre et à un emplacement géographique particulier et stratégique d’enclave. Au-delà de ces références, la région administrative, appelée Oblast, de Kaliningrad, coincée entre la Pologne et la Lituanie, est à la fois un port, une ville, des plages que les curieux adoreront visiter… Voyage dans une enclave russe au cœur de l’Europe remise au goût du jour avec la coupe du monde de football 2018.
Un peu d’histoire
Pour mieux comprendre Kaliningrad, il faut se replonger dans l’histoire de la Seconde Guerre mondiale et dans l’arrivée du rouleau compresseur russe sur le front est, une victoire sur les Allemands qui valut à l’ancienne capitale de Prusse Orientale Königsberg son nouveau nom de Kaliningrad. D’ailleurs, les habitants actuels de la ville se demandent pourquoi elle garde toujours ce nom. Staline la rebaptisa en effet ainsi en l’honneur d’un de ses fidèles, Kalinine, ancien chef du Soviet Suprême qui n’aurait jamais mis les pieds là-bas mais décéda au moment où la ville passait des mains allemandes aux mains soviétiques en 1946.
Et là, Staline fait tout pour effacer les traces allemandes de l’ex-Königsberg.
“Les Soviétiques ont expulsé tous les Allemands survivants qui vivaient là et ont fait venir des Russes de différents Oblast de l’Union Soviétique – Biélorussie, Kazakhstan, Sibérie… – et créer ainsi une sorte de colonie multirégionale et ethnique dans cette enclave européenne”, explique Vicktoria Korneva dans un anglais parfait, elle est guide et organise des visites dans tout l’Oblast, la ville et le bord de mer, axées sur la culture, l’Histoire et aussi les expériences de tourisme durable dans la campagne.
Du coup, c’est un étonnant mélange de peuples que l’on découvre à Kaliningrad. D’autant plus que la ville est aussi un port, l’un des plus importants de la Russie, ce qui n’a pas manqué d’accentuer les brassages de peuples ces soixante-dix dernières années !
« English not spoken »
Jusqu’en 1991, la ville était strictement interdite aux étrangers. Une fermeture drastique que l’on ressent encore aujourd’hui, vingt-sept années plus tard. Quasiment personne ne parle anglais à Kaliningrad, la ville a ses propres marques, ses propres chaînes. Mais les magasins ne sont pas le seul dépaysement de Kaliningrad. L’architecture aussi déstabilise, même si on a l’habitude des villes reconstruites après la guerre. Rebâtie à la va-vite, les immeubles de l’artère principale, l’avenue Lénine, ne donnent pas envie de prendre un appartement en centre-ville… Königsberg fut en effet rasée. Les Allemands qui affectionnaient particulièrement la ville – apparemment l’une des plus belles villes allemandes – ont tout fait pour ne pas capituler. Ils avaient écrit “Wir kapitulieren nie ! – nous ne capitulerons jamais -” sur les murs du château… Le château dont les ruines furent remplacées par l’hideux Dom Sovietov – la Maison des Soviets – aujourd’hui à l’abandon et que les habitants de Kaliningrad surnomment “Le Monstre”.
Peu de touristes sauf quelques Allemands nostalgiques
Cependant, quelques bâtiments ont survécu comme la cathédrale en briques rouges du XIVème siècle où, dans un tombeau adjacent, repose le fameux philosophe Emmanuel Kant, originaire de Königsberg. On trouve aussi ça et là quelques immeubles encore en ruines, troués d’obus, auxquels personne n’a touché depuis plus de soixante-dix ans. Restent aussi des répliques de hautes bâtisses typiques des grandes villes des pays baltes qui longent le canal. Enfin, quelques grandes villas allemandes tiennent encore debout dans des allées calmes et parsemées de petits espaces verts.
“Des Allemands nostalgiques viennent régulièrement se balader dans ces allées. Ils vont aussi sur la côte dans des stations balnéaires comme Svetlogorsk. Ils aiment se ré-imprégner du passé”, raconte Vicktoria, pour qui, malgré la tentative stalinienne d’effacer toute trace allemande, estime que le passé et l’ancienne présence allemande sont “restés là, bien ancrés dans la terre”.
La beauté du bord de mer
Pour aller à la mer, il suffit de prendre un taxi. En une demi-heure, on se retrouve dans un autre temps, au milieu de belles et grandes maisons en bois de la fin du XIXème siècle, de petites rues bordées de grands conifères, d’arbres qui descendent presque jusqu’à la mer. La promenade le long de la mer est somptueuse et les lumières sur la mer Baltique douces et magiques. Pour se remettre de tant de beauté, allez manger une pâtisserie dans l’un des nombreux cafés, salons de thé. Faites aussi un saut jusqu’au plus petit parc national de Russie, l’Isthme de Courlande où vous pourrez vous aventurer sur les plus hautes dunes d’Europe. On peut rentrer en train sur Kaliningrad et du coup, découvrir la gare de la ville à l’architecture totalement soviétique.
Autres atouts de Kaliningrad : on y mange bien et pas cher. Les diversités culinaires des anciennes républiques de l’URSS se retrouvent aussi dans les assiettes ! Essayez par exemple la très chouette brasserie Zarya pour son menu fourni et son beau décor. Pour la « nightlife », aucune inquiétude, la ville est sûre et, si vous aimez les vinyls, les CD et écouter de la bonne musique pop-rock, allez au Kvartira, un bar dans un appartement au rez-de-chaussée d’un immeuble soviétique.
De quoi se remettre en forme pour aller visiter le fameux Bunker où les Allemands se sont retranchés, essayant de lutter jusqu’au bout contre les Russes. Visitez aussi le Musée de l’Ambre : 90% des ressources mondiales de cette pierre se trouvent en effet à Kaliningrad. Vous pouvez aussi vous rendre à Yantarny découvrir sa mine d’ambre et aussi vous baigner : les plages y sont magnifiques et à l’abri du vent.
Arrière-pays et foot
Kaliningrad, c’est aussi pléthore de trésors cachés en pleine campagne comme les ruines des châteaux médiéval et gothique de Balga et Neman. Pour plus d’exploration de vieilles pierres, rendez-vous dans l’ancienne ville médiévale, détruite pendant la deuxième guerre mondiale, de Chernyakhovsk. Pour plus de poésie, baladez-vous dans la Forêt Dansante qui doit son nom aux troncs courbés de ses pins. Un autre château, celui de Waldau dans le village de Nizovie à Guryevsk, vaut aussi une petite visite pour les amateurs d’Histoire du XIIIème siècle à nos jours.
Attention à la Coupe du monde de football : pour les amateurs, aller voir un match est l’occasion de découvrir l’enclave. Pour les autres, évitez d’y aller.
La possibilité d’obtenir un visa de 72 heures sans passer par toutes les démarches pénibles de l’obtention d’un visa russe rend l’escapade beaucoup plus facile.
En avion
Kaliningrad est desservie par un aéroport international qui assure une liaison quotidienne depuis l’Europe et des principales villes russes. Les compagnies les plus populaires sont LOT Polish airlines (via Varsovie) et AirBaltic (via Riga). De plus, plusieurs liaisons par jour sont assurées par la compagnie Aeroflot en provenance de Moscou. Sachez qu’il n’est pas nécessaire d’avoir un visa à double entrée si vous arrivez depuis Moscou en vol transit. La compagnie RusLine propose aussi des vols directs entre Kaliningrad et Berlin ou Prague.
En train
Un train de nuit en provenance de Berlin est en service : moderne et confortable, il offre une véritable alternative à l’avion. Le trajet fait Berlin – Gdansk – Kaliningrad. Vous trouverez plus d’information et les horaires sur les sites des chemins de fer allemands Deutschebahn et des chemins de fer polonais PKP.
En Bus
Kaliningrad est reliée par bus à toute l’Europe, horaires et information sur www.eurolines.com.
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