Tourisme durable

Indonésie : Sukamade, la plage aux tortues

19 Juin 2023 - Biodiversité / Nature / Préservation

Dans le sud-est de l’île de Java, s’étend le parc national de Meru Betiri, une forêt tropicale dense où se niche la plage protégée de Sukamade, l’un des plus importants lieux de ponte des tortues d’Indonésie.


 La plage de Sukamade ©Sophie Squillace
 La plage de Sukamade ©Sophie Squillace


 

L’île de Java est souvent oubliée au profit de la jolie Bali. Quelques voyageurs intrépides s’aventurent toutefois dans sa partie orientale, près de ses majestueux volcans, le Kawah Ijen ou le Bromo. Mais ils sont plus rares à savoir, qu’à seulement une journée de voyage, une plage peu ordinaire se cache dans le parc national de Meru Betiri. Le long de la côte la plus reculée du sud-est de Java, Sukamade est le refuge de grands groupes de tortues qui viennent pondre leurs œufs tout au long de l’année. Un événement captivant et unique qu’une poignée de visiteurs a la chance de voir.

 

Parc National de Meru Betiri ©Sophie Squillace
Parc National de Meru Betiri ©Sophie Squillace

 

 



La ponte des tortues de mer en Indonésie

 
C'est un voyage ardu pour pénétrer dans la jungle et affronter les conditions de pistes coriaces à l’intérieur du parc. 580 km2 de forêt protégée composent le parc national de Meru Betiri, connu pour être le dernier habitat du tigre de Java, ainsi que de quelques léopards et sangliers parmi d'autres mammifères. Mais les stars ici, ce sont les tortues, luth, olivâtres et vertes, espèces toutes en voie de disparition qui reviennent sur leur lieu de naissance pour donner la vie. 
 
 
Nuit de ponte à Sukamade ©Jean-Marie Hullot
Nuit de ponte à Sukamade ©Jean-Marie Hullot


 

Au centre de conservation des tortues de Sukamade, situé à 700 mètres de la plage, l’équipe de rangers, véritables gardiens des tortues de mer, patrouille tous les soirs, jusque tard dans la nuit, pour ramasser les œufs et les mettre ainsi à l’abri des différentes menaces. Nouvellement éclos, les œufs ou les nouveau-nés, une fois dans l'eau, deviennent la proie des oiseaux de mer, varans et autres animaux marins. 
 
Les chances de survie en pleine mer sont minces, surtout les premières vingt-quatre heures, quand les bébés tortues doivent surfer sur les vagues dans l'espoir de ne pas être enlevés par les oiseaux ou pris dans du plastique qui est malheureusement devenu une caractéristique de nombreux littoraux indonésiens. Sans oublier une autre menace : le braconnage la nuit de la ponte. Car les œufs de tortues sont très recherchés et revendus pour leur viande, leur peau et leur carapace. 
 
 
Oeuf de tortue à Sukamade ©Sophie Squillace
Oeuf de tortue à Sukamade ©Sophie Squillace

 

 

Voyage en haute mer 

 
Chaque soir, lorsque la marée haute permet de se rendre facilement à l'arrière de la plage, d’énormes tortues de mer arrivent lentement et viennent creuser un trou immense avec leurs nageoires postérieures, dans lequel elles s’apprêtent à pondre leurs œufs. Après deux heures de labeur, une tortue aura généralement pondu entre 120 et 160 œufs, et repartira épuisée vers la mer, laissant ses petits derrière elle. L’équipe de bénévoles de Sukamade participe alors à la délicate mission de transporter des œufs fraîchement pondus dans le sable jusqu’à l’écloserie à proximité. Les jeunes tortues pourront incuber pendant 6 à 8 semaines en sécurité avant d’être relâchées en mer.
 
 
Les bébés tortues prêts pour le grand voyage ©Sophie Squillace
Les bébés tortues prêts pour le grand voyage ©Sophie Squillace


 

Après avoir assisté au spectacle de la ponte dans le plus grand des silences, le visiteur retourne sur la plage à l’aube, avec un seau rempli de bébés tortues, prêts à être relâchés. Les plus jeunes hésitent, trébuchent, parfois se percutent ou essayent en vain de bondir en avant. Avant de se précipiter vers l’océan, les tortues impriment dans leur mémoire le lieu d’où elles viennent et reviendront pondre sur cette même plage des années plus tard. L'expérience extrêmement émouvante invite chaque visiteur à un profond respect et à ne plus jamais regarder les tortues de la même façon.