Bien que le tourisme de masse soit un phénomène décrié depuis quelques années, la fin du confinement a permis de réaffirmer le besoin de changer ce modèle économique. Les images de l’eau transparente à Venise durant cette période de retrait ont fait le tour du monde et démontré clairement l’impact négatif du tourisme.
Pour de nombreuses villes, c’est l’opportunité pour réformer le secteur et se diriger vers un tourisme plus responsable. Harold Goodwin, spécialiste du tourisme responsable, évoque des propositions à mettre en place immédiatement pour que le secteur puisse surmonter la crise de la Covid-19 et les défis du développement durable.
Le tourisme est souvent perçu comme un secteur résilient. La pandémie est la crise qui devrait vérifier ces dires. Après un arrêt brutal pendant plus de deux mois, les professionnels espèrent revoir leur clientèle pour et au-delà de la saison estivale. Les frontières européennes ont été ouvertes au début du mois de juillet, permettant au secteur de repartir dans le vert. Mais pouvons-nous encore reproduire le modèle économique du tourisme avant la crise ?
Depuis quelques années, l'OMT, des associations et des professionnels du tourisme ont appelé à changer l’industrie du tourisme pour correspondre aux enjeux écologiques : mettre fin au surtourisme et développer des projets et des initiatives de tourisme durable. La pandémie de la Covid-19 a été un rappel supplémentaire sur le besoin de transformer cette industrie. Le spécialiste du tourisme responsable, Harold Goodwin, a évoqué les principales actions pour réinventer ce secteur et faire perdurer un changement réel dans le monde du voyage.
Une des solutions apportées pour le secteur aéronautique est l’objectif de neutralité carbone. Des acteurs du secteur aéronautique ont déjà commencé à se transformer, notamment avec l’arrêt des avions Boeing 747 par CorsAir et de l’Airbus A380 par Air France. La compagnie aérienne Finnair avait déjà opéré ses premiers vols à base de biocarburants et Lufthansa va prochainement utiliser un kérosène synthétique.
L’organisme gouvernemental pour une aviation durable au Royaume-Uni (Sustainable Aviation Coalition) a récemment publié leur plan d’actions pour atteindre la neutralité carbone. Il s’axe principalement sur un carburant provenant de déchets. L’organisme assure que le secteur de l’aviation britannique peut croître de 70% dans les 30 prochaines années, tout en respectant les objectifs climatiques. Une perspective qui devrait rassurer le secteur aéronautique, qui s’inquiète de la perte économique liée à un virage écologique.
Le WTTC (World Travel & Tourism Council) a prévu une perte de 100 millions d’emplois, dont 75% dans les pays du G20. Ainsi, revenir à la situation antérieure semble être la meilleure solution pour retrouver le même dynamisme économique. Néanmoins, des voix s’élèvent pour utiliser « cette pause » pour repenser un tout nouveau système touristique.
Paola Mar, la conseillère municipale pour le tourisme de Venise exhorte le gouvernement à mettre la durabilité et la qualité au cœur des politiques touristiques. Une volonté que l’ONG Amsterdam & Partners veut voir naître dans la capitale néerlandaise en réaffirmant le besoin d’instaurer une politique pour réduire le nombre de visiteurs et rendre la ville aux locaux. Des politiques de lutte contre le surtourisme avaient déjà été mises en place comme l’interdiction d’Airbnb dans certaines villes françaises, l’installation d’une taxe pour les visiteurs à Venise, des amendes en cas de comportements irrespectueux à Barcelone ou une limite du nombre de visiteurs sur le Machu Picchu. Ces décisions devraient s’accentuer dans les mois à venir.
Le voyageur n’est plus un simple spectateur, mais bien un consom’acteur lorsqu’il se déplace. Harold Goodwin évoque l’initiative de The Green Butler. Il aide les hôtels à réduire leur impact écologique et rend les clients conscients de leur propre consommation pendant leur séjour. Ainsi, ils deviennent des acteurs intégrés au processus du tourisme responsable. L’exemple le plus connu pour impliquer le touriste est le concept de compensation carbone. Il permet de trouver un équilibre entre ce que les personnes consomment et ce qu’ils peuvent donner en retour. La compagnie finlandaise Finnair a lancé son propre service de compensation carbone en invitant ses passagers à payer une taxe qui financera des projets écologiques.
Toutes ces idées ne peuvent être mises en place sans un soutien financier et un engagement réel. L’Union Européenne, à travers la BERD (Banque européenne pour la reconstruction et le développement) et l’OMT vont débloquer près de 21 milliards d’euros pour soutenir l’industrie mondiale du tourisme. Cet investissement devra permettre aux entreprises de répondre aux exigences sanitaires et développer plus d'actions durables.