Tourisme durable

Dans l’intimité des Rana Tharu, peuple méconnu du Népal

30 Mars 2018 - Art / Initiatives / Portrait

Cela fait dix ans que Pierre Benais parcourt le monde de maison en maison, afin de vivre au plus près des communautés rencontrées et de filmer leur quotidien. Ce jeune réalisateur de documentaires de voyage est récemment revenu du Népal, où il a vécu deux mois auprès du peuple Rana Tharu, une petite communauté très peu connue du monde comme de ses propres voisins – “il m’a fallu une semaine, arrivé sur place, pour trouver où ils habitaient”, explique Pierre. Zoom sur ce documentaire qui a reçu le prix du Meilleur premier film au dernier festival du Grand Bivouac.

 

Rana Tharu, documentaire de Pierre Benais

 

 

 

Un film qui donne la parole aux invisibles…

 
 
Lorsqu’il n’est pas sur les routes, Pierre Benais cuisine pour financer ses voyages. Ce passionné d’images rêve de devenir réalisateur de documentaires et de pouvoir un jour en vivre. Son dernier film, Rana Tharu, se veut très prometteur : récompensé au dernier festival du Grand Bivouac, haut-lieu du film de voyage en France, ce documentaire de 26 minutes raconte le quotidien si peu connu et quasi-apatride.
 
Originaire du Rajasthan mais émigré au Népal suite à des guerres de religions, le village des Rana Tharu, une communauté de quelques dizaines de milliers de personnes, offre une vie dure, où hommes et femmes travaillent jusqu’à leur mort, et où les traditions sont ancrées dans le quotidien de tous.
 
Ces traditions, à l’instar de très nombreux peuples vivant en retrait de la société moderne, les villageois ne savent parfois plus vraiment ce qu’ils doivent en faire : les conserver, car elles font partie intégrante de leur culture et de leur éducation, ou les oublier/les faire évoluer, car elles vont parfois à l’encontre de ce que la modernité peut apporter de positif ?
 
 
 
Des images pleines de couleurs et de délicatesse... ©Pierre Benais
Des images pleines de couleurs et de délicatesse… ©Pierre Benais
 
 
 
Je n’apparais en aucune façon dans mes films, explique Pierre Benais, ni à l’image, ni en voix-off. Je veux que ma caméra serve les autres : qu’elle permette aux peuples rencontrés de s’exprimer, et aux autres, d’apprendre. Les Rana Tharu ont participé de façon très active au montage du film, et Laltilla Bebi Rana, la voix-off et l’héroïne du film, a écrit elle-même son texte.
 
Pierre veut que sa présence ne soit jamais intrusive et n’ait jamais rien de touristique : “Lorsque je me rends quelque part, je me fixe dans un endroit donné, et je vis le quotidien des personnes qui m’hébergent. Je travaille avec eux, mange avec eux, dors avec eux… et suis même malade avec eux !”  
 
 

Faire évoluer les consciences

 
 
Dans Rana Tharu, Pierre Benais filme, au travers du quotidien de ses hôtes, l’ouverture d’esprit de certains d’entre eux - à commencer par la narratrice - qui fait face aux désirs de conservatisme d’autres. Un mariage d’amour est célébré à la fin du film : les parents de la mariée, qui ne supportent pas l’idée que leur fille ait choisi son époux au lieu de suivre la tradition d’un mariage arrangé, ne sont pas venus.
 
Mais malgré ses 70 ans passés, Laltilla Bebi Rana veut éveiller les consciences et est heureuse à l’idée que les jeunes générations pourront choisir avec qui ils décident de construire leur vie : “ainsi, ils vivront heureux”, déclare-t-elle.
 
 
 
Laltilla, l’héroïne du film, au travail du grain ©Pierre Benais
Laltilla, l’héroïne du film, au travail du grain ©Pierre Benais
 
 
 
C’est d’ailleurs bien l’évolution des consciences qui fait qu’aujourd’hui, les Rana Tharu peuvent enfin trouver du travail dans les contrées environnantes. Presque considérés comme des intouchables, la caste la plus basse en Inde, ils commencent à être enfin mieux considérés, et cela leur offre de nouvelles perspectives. S’ils ne sont plus forcés à rester travailler au village, les jeunes pourront se diriger vers les villes ; et ainsi, soit dire adieu à leurs racines, soit y rapporter une touche d’urbanisme et de confort.
 
Rana Tharu est donc un très beau documentaire de voyage, qui filme avec délicatesse et discrétion le quotidien d’un peuple qui cherche simplement la voie du bonheur.
 
Le film est visible gratuitement sur le site Youtube, et rendez-vous sur la page Instagram de Pierre Benais pour découvrir le reste de son travail !