Les Indiens Bribris vivent aux confins du Costa Rica, dans une réserve de la région caribéenne du pays, entre montagnes et rivières sous un climat tropical. Si leur territoire dispose de riches ressources naturelles, et surtout d’un cacao de haute qualité, leur vie reste fruste. Les visiteurs seront séduits par leurs récits sur l’origine du monde et par la bienveillance de leur accueil.
Les mèches de cheveux du jeune homme tombent avec légèreté sur le sol. Après des heures de marche à travers la montagne pour arriver jusqu’au village de Bambú, chez les Bribris, cette séance de coiffure semble comme une libération pour le frêle garçon qui ne dira jamais son nom. Nous apprenons que depuis son lointain hameau des cimes, il fait régulièrement le trajet jusqu’à Bambú, chargé d’un lourd ballot de bananes à vendre et dormant en route au cœur de la forêt tropicale. Trois jours pour descendre…
À côté, le “lodge“ Ditsöwö Ú de Danilo apparaît comme un havre confortable, avec ses solives de bois protégées par un épais toit de chaume, et ses espaces ouverts aux quatre vents, qui offrent une vue bucolique sur la rivière Telire en contrebas, derrière un rideau d’arbres luxuriants. Une pirogue à moteur fait fuir une grue absorbée par sa pêche. De la maison s’élève un fumet de banane plantain rissolée et de café.
Dans la réserve indienne des Bribris, située dans la région caribéenne au sud du Costa Rica, à la frontière avec le Panama, ils sont quelques-uns à accueillir des étrangers pour une immersion dans le quotidien et la culture de leur ethnie.
Danilo le père et ses fils Beto et Danni tiennent une maisonnée où vont et viennent amis, voisins, membres de la famille, comme si cette demeure était au centre des activités de la communauté. C’est que Danilo est un personnage, un leader qui ne mâche pas ses mots et se démène pour son peuple.
Les Indiens Bribri et Cabécar, l’ethnie isolée des montagnes, comptent environ 15 700 âmes dans la réserve. Si la terre est généreuse, donnant à foison bananes et cacao, les bourses sont bien vides.
Nous avons des ressources naturelles, mais nous sommes pauvres.
"Nous avons des ressources naturelles, mais nous sommes pauvres, explique Danilo. Les négociants qui viennent acheter bananes et cacao imposent un prix ridicule aux producteurs. Et nos représentants ne font rien à cause des enjeux politiques dans lesquels ils sont impliqués."
L’amertume est d’autant plus forte que pour les Bribris, le cacao n’est pas seulement un produit : il est sacré et constitue le pilier de la cosmogonie de ce peuple. Les plantations sont principalement l'œuvre des femmes, qui cultivent un cacao bio en veillant à éliminer tout fruit atteint par la maladie du cacaoyer, qui a causé des ravages dans la région. Un travail d’arrache-pied.
Rubén, un proche de la famille, embarque les hôtes en pirogue pour découvrir la culture ancestrale autour du cacao, dans le village d’Amubri où officie un chaman dans une hutte cérémonielle peuplée de fétiches, animaux sauvages empaillés et amulettes de toutes sortes. Selon les dires, le chaman aurait été averti par les esprits qu’une catastrophe - le Covid - allait s’abattre sur l’humanité.
Voici quelque temps, une Française a fait le voyage. Magalicia, chef d’entreprise d’origine péruvienne, veut créer une filière de cacao bio de haute qualité avec la production des Bribris, pour approvisionner des chocolatiers haut de gamme, en France et ailleurs. Payer un prix juste aux producteurs, fabriquer un produit fin et générer de nouveaux débouchés : le cercle vertueux soulève les espoirs de la communauté. Semé d’embûches, le projet n’avance que lentement, mais Tsirú, la déesse chocolat, n’a pas dit son dernier mot pour que le peuple Bribri connaisse des jours meilleurs.
Pour en savoir plus :
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