En hiver au Svalbard, le soleil affiche de bien pâles lueurs. Mais les habitants russes de Barentsburg ne regrettent pas trop la lumière de la surface, tout occupés qu'ils sont à travailler au fond d'une mine. Pour enrayer la baisse de l'activité minière, le village polaire, vestige de l'ex-URSS, s'ouvre au tourisme.
Direction Barentsburg où une petite communauté russe s'active autour de l'extraction de charbon. Car si l'archipel est sous souveraineté norvégienne, les pays signataires du Traité du Svalbard en 1920 ont le droit d'en exploiter les ressources naturelles. La Russie est aujourd'hui le seul pays étranger à exercer ce droit. Pour atteindre le village situé à 55 km de Longyearbyen, il n'y a que le bateau l'été et la motoneige l'hiver.
Ce matin, l'air est plutôt vif : l'intérieur des narines se colle à chaque inspiration. Lorsqu'on demande la température ambiante à Fyodor, le guide russe prend son thermos d'eau bouillante, remplit un gobelet qu'il jette en l'air. L'eau se dissipe instantanément en un nuage de givre. "Voilà, il fait au moins -20 °C !" Béni soit l'inventeur des poignées chauffantes sur les motoneiges ! Les engins s'enfoncent dans le feutre de la neige et du froid sous des cieux qui semblent avoir été repeints pour des chambres d'enfant, entre le rose parme et bleu layette.
Ici et là, des rennes grattent le manteau neigeux à la recherche de lichens bientôt broutés avec une gourmandise de vaches normandes. À mi-chemin, les premiers rayons de soleil de l'année illuminent enfin le sommet des plus hautes montagnes. Il faudra s'en contenter, l'astre lui-même ne daignera se montrer que le 8 mars.