Joyau de l’Anatolie centrale en Turquie, la Cappadoce invite à marcher dans les pas de l’Histoire. Car ses montagnes abritent des églises troglodytes ornées d’une infinité de fresques rupestres.
La Cappadoce est célèbre aux yeux des touristes pour le survol en montgolfière de ses somptueux paysages, et c’est une expérience inoubliable. Pourtant, dans la pénombre de leurs cavités secrètes, les montagnes de Cappadoce révèlent à quel point cette région d’Anatolie devint l’un des hauts lieux du christianisme et de l’art byzantin, dès le début de l’ère chrétienne avec la fondation de l’Empire romain d’Orient par l’empereur Constantin en 330.
Au creux de roches sculptées en “cheminées de fée“ par les éléments se succèdent d’étonnantes églises troglodytes, richement ornées de fresques de scènes bibliques aux couleurs éclatantes, témoignant de l’opulence de l’art byzantin jusqu’à la chute de Constantinople en 1453. Le Musée à ciel ouvert de Göreme, au cœur de cette vallée ceinturée de sommets qui culminent au loin, à 3900 mètres avec le volcan du Mont Argée, est une véritable promenade dans le temps.
Minéral, ocre et gris, le paysage lunaire et irréel invite à la méditation, comme les moines et les religieuses l’ont sans doute pratiquée, des siècles durant, à l’abri de leurs cellules et de leurs églises creusées dans ces roches tendres. Parfois de dimensions modestes, elles peuvent aussi, comme la somptueuse église Tokalı Kilise ou église de la Boucle, construite au Xème siècle, atteindre des proportions monumentales et offrir à la vue le bleu profond du lapis-lazuli utilisé pour ses représentations de la crucifixion ou de la vie des saints.
Tout commence, selon les guides, avec les premiers chrétiens fuyant les persécutions de la Rome antique. Certains trouvèrent refuge dans cette région d’Asie mineure, aujourd’hui Anatolie, et vécurent cachés comme dans cette étonnante cité souterraine de Derinkuyu, où l’on s’enfonce jusqu’à 60 mètres sous terre dans un réseau de galeries qui desservent des espaces d’habitation, de stockage de nourriture, mais aussi un espace architecturé en forme de croix, pour l’église.
Ces chrétiens, dit-on, n’étaient pas les premiers à choisir une vie troglodyte : avant eux, au XIIIème siècle avant J.C., les Hittites, notamment, auraient occupé ces espaces souterrains, hors de portée des assaillants. Plusieurs autres villes troglodytes ont été découvertes ainsi que des tunnels les reliant les unes aux autres. La visite est fascinante et permet de mesurer, à voir les meules de pierre servant à bloquer de l’intérieur les ouvertures des galeries, combien la menace était prégnante dans la vie quotidienne de ces habitants.
Hors les murs, une autre escapade s’impose dans la vallée d’Ihlara et ses gorges verdoyantes. Cette promenade d’environ trois heures est un pur bonheur. La marque de l’histoire se fait ici également sentir : géologique d’abord, puisque ce canyon où serpente la rivière Melendiz s’est formé grâce à la rupture par éruption volcanique d’une falaise de grès, voici des millénaires.
Mais nous y retrouvons aussi la marque de l’histoire humaine, creusée dans les alcôves de la falaise qui abritent d’autres églises troglodytes aux somptueuses peintures. À destination, l’hospitalité turque prend tout son sens. On vous convie à savourer, confortablement installés sur un îlot aménagé de la rivière, un thé accompagné de délicieuses galettes cuisinées à la braise sous vos yeux.